ARTICLES & INFOS S.A.T
- " L'Afrikaans" (1)
- Acheter une propriété en AFS? (1)
- Apartheid de 1948 à 1994 (1)
- FAQ: Questions / Réponses (1)
- Infos: Géographie et Climat (1)
- Infos: Populations et Ethnies (1)
- Le Monde Diplomatique « Embauche équitable » pour les Sud-Africains (1)
- Le Tourisme Equitable (1)
- Les "Big Five" (1)
- Livre de cuisine sudaf (1)
- Quelques faits remarquables pour l'AFS (1)
- Rugby South Africa (1)
- South African History *** (1)
- South African Music (1)
- Voyages Walmer Township modèle? (1)
Le Monde Diplomatique « Embauche équitable » pour les Sud-Africains
http://www.monde-diplomatique.fr/2007/05/ROSSOUW/14704
Quand le Congrès national africain (African National Congress, ANC) a pris les rênes du pouvoir en 1994, il s’est trouvé confronté à une situation économique et sociale catastrophique. Il lui a aussi fallu s’attaquer aux inégalités et aux injustices héritées de l’apartheid. Sous l’impulsion de M. Thabo Mbeki, l’ANC a opté pour une stratégie fondée sur la création d’une classe moyenne noire : discrimination positive à l’embauche et transfert d’une partie des actifs des entreprises privées à des Noirs (Broad-Based Black Economic Empowerment Act, BEE).
La politique volontariste adoptée par l’ANC a effectivement produit une classe moyenne noire, estimée à un ou deux millions d’individus (sur une population noire, y compris les Sud-Africains « asiatiques » et « métis », de plus de quarante millions). Et, signe quelque peu paradoxal de rééquilibre, entre 1991 et 2002, le chômage des Noirs augmente moins vite que celui des Blancs : 105 %, contre 150 %. Cependant, la politique de l’ANC a aussi généré un certain nombre d’effets pervers.
La principale mesure adoptée par le gouvernement est la loi sur l’« embauche équitable » (Employment Equity Act), votée en avril 1999, alors que M. Mbeki était sur le point de prêter serment comme président de l’Afrique du Sud. Cette loi a pour but de donner leur juste place sur le marché du travail aux catégories de Sud-Africains, y compris les femmes et les handicapés, victimes de discriminations. Cependant, les séquelles de l’apartheid étant évidemment la priorité des pouvoirs publics, ce texte a presque exclusivement été utilisé en faveur des Noirs.
En conséquence de cette logique raciale, des milliers de fonctionnaires blancs aguerris ont été incités à quitter leurs postes grâce à des primes de licenciement. Cette politique a déjà coûté 1 milliard de rands (103 millions d’euros) à l’Etat rien que pour les enseignants. Un député ANC est allé jusqu’à affirmer à la presse : « Beaucoup de Blancs désertent le service public à cause de la politique gouvernementale. Certains restent parce qu’ils n’ont pas de solution de rechange, notamment les cadres moyens, et le font payer à leurs subordonnés sans que personne ne le sache (1). »
Autre effet pervers : la perte pour l’économie que représente le départ des Blancs qualifiés, en particulier les jeunes. On estime, en l’absence de données précises, que des milliers d’entre eux ont émigré au Royaume-Uni, au Canada, en Australie ou en Nouvelle-Zélande, mettant en cause la discrimination positive. En 1999, le nombre d’Afrikaners qui ont quitté le pays a, pour la première fois, dépassé celui des autres Blancs.
Si la visibilité des Noirs s’est accrue dans le secteur public, ce n’est pas le cas dans le privé. C’est pourquoi le BEE – la loi sur la promotion économique des Noirs – a été adopté. Le BEE prévoit, entre autres, de développer l’actionnariat noir. Les autorités politiques et les responsables des grands secteurs de l’économie se sont accordés sur des objectifs chiffrés : 25 % ou 30 % du capital des entreprises doit être détenu par des Noirs d’ici à 2015. Cependant, dans la plupart des cas, ces derniers ne disposent pas des capitaux nécessaires. Les transactions doivent donc être financées par des transferts de fonds compliqués, dont la société en cause supporte le risque. Cela explique pourquoi les mêmes oligarques noirs se retrouvent parties prenantes de toutes les opérations : leurs relations politiques minimisent les risques et permettent au monde des affaires de s’attirer les bonnes grâces des autorités gouvernementales. La logique du BEE, comme celle de la discrimination positive en général, n’est pas de redistribuer les richesses. En pratique, elle aboutit à la création d’une petite élite noire parvenue (2).
A la faveur de la lutte contre les discriminations séculaires dont ont été victimes une grande majorité d’habitants, une caste politico-affairiste s’installe à la tête de l’Afrique du Sud. Le pays devient, sur ce point, comme les autres Etats africains : la classe dominante noire rejoint ses homologues blancs et tente de s’enrichir. Pour M. Moeletsi Mbeki, frère du président et intellectuel reconnu, le BEE est « l’autre face d’une politique visant à drainer l’épargne des opérateurs privés dans une économie dépourvue d’une classe paysanne à exploiter et où le capital est éclaté au niveau local. Si l’application du BEE s’est révélée une bataille plus difficile que prévu, c’est que le secteur privé a su résister à toute dépossession. Mais la lutte ne fait que commencer... (3) ».
Pour le moment, l’ANC refuse de reconsidérer sa politique de discrimination positive. Une solution de rechange serait pourtant possible, si la race cessait d’être une catégorie sociale : la langue pourrait être choisie comme critère de recrutement (il en existe onze officiellement reconnues). Durant l’apartheid, la discrimination raciale coïncidait avec la répression des dialectes indigènes. En exigeant des employés qu’ils parlent couramment deux langues locales, on corrigerait des injustices et on contribuerait à la réconciliation nationale.
Johann Rossouw
Quand le Congrès national africain (African National Congress, ANC) a pris les rênes du pouvoir en 1994, il s’est trouvé confronté à une situation économique et sociale catastrophique. Il lui a aussi fallu s’attaquer aux inégalités et aux injustices héritées de l’apartheid. Sous l’impulsion de M. Thabo Mbeki, l’ANC a opté pour une stratégie fondée sur la création d’une classe moyenne noire : discrimination positive à l’embauche et transfert d’une partie des actifs des entreprises privées à des Noirs (Broad-Based Black Economic Empowerment Act, BEE).
La politique volontariste adoptée par l’ANC a effectivement produit une classe moyenne noire, estimée à un ou deux millions d’individus (sur une population noire, y compris les Sud-Africains « asiatiques » et « métis », de plus de quarante millions). Et, signe quelque peu paradoxal de rééquilibre, entre 1991 et 2002, le chômage des Noirs augmente moins vite que celui des Blancs : 105 %, contre 150 %. Cependant, la politique de l’ANC a aussi généré un certain nombre d’effets pervers.
La principale mesure adoptée par le gouvernement est la loi sur l’« embauche équitable » (Employment Equity Act), votée en avril 1999, alors que M. Mbeki était sur le point de prêter serment comme président de l’Afrique du Sud. Cette loi a pour but de donner leur juste place sur le marché du travail aux catégories de Sud-Africains, y compris les femmes et les handicapés, victimes de discriminations. Cependant, les séquelles de l’apartheid étant évidemment la priorité des pouvoirs publics, ce texte a presque exclusivement été utilisé en faveur des Noirs.
En conséquence de cette logique raciale, des milliers de fonctionnaires blancs aguerris ont été incités à quitter leurs postes grâce à des primes de licenciement. Cette politique a déjà coûté 1 milliard de rands (103 millions d’euros) à l’Etat rien que pour les enseignants. Un député ANC est allé jusqu’à affirmer à la presse : « Beaucoup de Blancs désertent le service public à cause de la politique gouvernementale. Certains restent parce qu’ils n’ont pas de solution de rechange, notamment les cadres moyens, et le font payer à leurs subordonnés sans que personne ne le sache (1). »
Autre effet pervers : la perte pour l’économie que représente le départ des Blancs qualifiés, en particulier les jeunes. On estime, en l’absence de données précises, que des milliers d’entre eux ont émigré au Royaume-Uni, au Canada, en Australie ou en Nouvelle-Zélande, mettant en cause la discrimination positive. En 1999, le nombre d’Afrikaners qui ont quitté le pays a, pour la première fois, dépassé celui des autres Blancs.
Si la visibilité des Noirs s’est accrue dans le secteur public, ce n’est pas le cas dans le privé. C’est pourquoi le BEE – la loi sur la promotion économique des Noirs – a été adopté. Le BEE prévoit, entre autres, de développer l’actionnariat noir. Les autorités politiques et les responsables des grands secteurs de l’économie se sont accordés sur des objectifs chiffrés : 25 % ou 30 % du capital des entreprises doit être détenu par des Noirs d’ici à 2015. Cependant, dans la plupart des cas, ces derniers ne disposent pas des capitaux nécessaires. Les transactions doivent donc être financées par des transferts de fonds compliqués, dont la société en cause supporte le risque. Cela explique pourquoi les mêmes oligarques noirs se retrouvent parties prenantes de toutes les opérations : leurs relations politiques minimisent les risques et permettent au monde des affaires de s’attirer les bonnes grâces des autorités gouvernementales. La logique du BEE, comme celle de la discrimination positive en général, n’est pas de redistribuer les richesses. En pratique, elle aboutit à la création d’une petite élite noire parvenue (2).
A la faveur de la lutte contre les discriminations séculaires dont ont été victimes une grande majorité d’habitants, une caste politico-affairiste s’installe à la tête de l’Afrique du Sud. Le pays devient, sur ce point, comme les autres Etats africains : la classe dominante noire rejoint ses homologues blancs et tente de s’enrichir. Pour M. Moeletsi Mbeki, frère du président et intellectuel reconnu, le BEE est « l’autre face d’une politique visant à drainer l’épargne des opérateurs privés dans une économie dépourvue d’une classe paysanne à exploiter et où le capital est éclaté au niveau local. Si l’application du BEE s’est révélée une bataille plus difficile que prévu, c’est que le secteur privé a su résister à toute dépossession. Mais la lutte ne fait que commencer... (3) ».
Pour le moment, l’ANC refuse de reconsidérer sa politique de discrimination positive. Une solution de rechange serait pourtant possible, si la race cessait d’être une catégorie sociale : la langue pourrait être choisie comme critère de recrutement (il en existe onze officiellement reconnues). Durant l’apartheid, la discrimination raciale coïncidait avec la répression des dialectes indigènes. En exigeant des employés qu’ils parlent couramment deux langues locales, on corrigerait des injustices et on contribuerait à la réconciliation nationale.
Johann Rossouw
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Les liens incontournables pour préparer votre voyage
Livres & Guides
- Récit: AFRICA TRECK par A & S Poussin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire